Télétravail depuis l'Allemagne : tout ce qu'il faut savoir

Le développement du télétravail en Allemagne pour des salariés d'entreprises françaises révèle des zones floues juridiques et fiscales. Vivre à l'étranger tout en travaillant pour une société française soulève un grand nombre de questions. Nous vous en disons plus sur les règles d'imposition, le droit du travail applicable et les questions de retraite si vous travaillez à domicile depuis l'Allemagne.
2. Quel droit du travail et quel régime de sécurité sociale sont applicables ?
3. Faut-il payer ses impôts en France ou en Allemagne ?
4. Les règles pour les frontaliers avec l'Allemagne
5. Quelles sont les formalités pour un employeur français ?
Il est parfaitement possible pour un employé de télétravailler dans un lieu autre que son domicile, par exemple depuis un hôtel, un espace coworking ou un logement loué en Allemagne, et ceci sans permis de travail.
En revanche, si le salarié choisit de télétravailler depuis l'Allemagne, il est dans l'obligation d'en informer son responsable pour obtenir son autorisation avant de partir.
Les conséquences du télétravail concernent surtout la sécurité sociale ainsi que le plan fiscal. Le salarié en home office est souvent amené à payer des impôts et des cotisations sociales dans le pays de télétravail, en l'occurrence en Allemagne.
Afin d'éviter une multiplication de l'imposition et des cotisations, il faut respecter des conditions strictes et remplir à l'avance des documents.
Concernant les impôts, la règle veut que si le salarié travaille à l'étranger pendant moins de 183 jours par an, il reste imposable en France sur l'ensemble de ses revenus, y compris ceux touchés à l'étranger. Le salaire doit être payé par son employeur français.
Dans l'Union Européenne, un salarié est soumis au régime de sécurité sociale du pays au sein duquel il travaille. Si l'employé exerce une activité dans plusieurs pays, il est soumis au régime de sécurité social du pays où l'activité est substantielle (25 % ou plus).
Si le salarié doit se déplacer au sein de l'Union Européenne, il peut rester sous le régime du pays de résidence, sous réserve de conditions.
☝ Attention : Dans certains pays, l'employeur et le salarié doivent payer des cotisations sociales dans le pays d'activité, sauf si le travailleur est considéré comme détaché dans ce pays.
Il est possible d'expérimenter un changement au niveau de la fiscalité de vos revenus d'activité.
Légalement, votre résidence fiscale se situe en France si l'une des conditions suivantes est remplie, sous réserve de conventions fiscales internationales avec d'autres pays. Pas d'inquiétude cependant, la France en a conclu 125 !
Votre foyer reste en France (c'est-à-dire votre conjoint ou PACS et enfants), même si vous devez séjourner dans un autre pays de manière temporaire ou pendant plus de la moitié d'une année, pour des raisons professionnelles. Si votre famille part avec vous, le domicile fiscal deviendra votre lieu de séjour principal.
Vous continuez à exercer une activité professionnelle, salariée ou non, sauf si elle est considérée comme accessoire.
La France représente le centre de vos intérêts économiques, si vous investissez principalement en France, si c'est le lieu de votre siège, le centre de vos activités professionnelles ou le lieu d'où vous tirez la majorité de vos revenus.
Si vous quittez la France, vous avez dès lors le statut de non-résident français et vous payerez votre impôt sur le revenu dans le pays de résidence, en accord avec les règles applicables du droit local et selon la convention fiscale éventuelle avec la France.
🔎 À noter : Le régime fiscal n'est pas forcément identique au régime social. Il y a donc de nombreux cas de figures, qui diffèrent d'un pays à l'autre : présence temporaire à l'étranger, télétravail dans un ou plusieurs pays différents.
Le droit interne français spécifie en son article 4B du Code Général des impôts, que les personnes considérées comme fiscalement domiciliées en France sont :
Celles qui ont leur lieu de séjour principal ou foyer en France.
Celles qui exercent en France une activité professionnelle, qu'elle soit salariée ou non, sauf si elle est reconnue accessoire.
Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.
Ces règles s'appliquent sous réserve des conditions particulières prévues dans les conventions fiscales éventuelles entre la France et les autres Etats.
La Haute Juridiction indique que pour l'application du paragraphe a. du 1. de l'Article 4 B du C.G.I., le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement en dehors du pays en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, telle, en l'espèce, la maladie d'un membre de la famille.
Le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où il ne dispose pas de foyer. Dans un communiqué, l'administration fiscale a transposé cette jurisprudence à la circonstance du confinement :
"Un séjour temporaire au titre du confinement en France, ou de restrictions de circulation (travel ban) décidées par le pays de résidence, n'est pas de nature à caractériser une domiciliation fiscale en France au titre de l'Article 4 B précité."
📌 Conclusion : Il faut donc partir du principe que si une personne est contrainte de rester provisoirement en France, en cas de force majeure, cela ne doit pas la conduire à considérer le pays comme son foyer permanent ou le centre de ses intérêts vitaux, uniquement pour ce motif.
L'employeur peut rédiger une charte, politique interne ou un avenant au contrat de travail concernant :
- la durée du télétravail à l'étranger en la limitant
- la zone autorisée pour le déplacement
- les modalités de remboursement des frais professionnels additionnels (notamment des frais de déplacement)
- les horaires de travail des personnes situées sur un fuseau horaire différent.
Le télétravail avec utilisation du wifi d'un hôtel ou d'un autre lieu peut entraîner des problèmes de sûreté pour les fichiers sensibles de l'entreprise : les données peuvent facilement être piratées ou volées.
L'employeur a donc le devoir de vérifier la sûreté des équipements informatiques des salariés pour être certain qu'ils offrent une protection suffisante. Il peut même interdire l'utilisation d'outils personnels au profit d'ordinateurs sécurisés par l'entreprise.
Les démarches à effectuer par l'entreprise sont très importantes dans le cas où un des salariés vit à l'étranger. Si vous êtes installé en Allemagne, l'entreprise française est dans l'obligation de s'immatriculer en Allemagne pour payer les charges sociales et les impôts ainsi que les prélèvements à la source.
Ces coûts sont très importants et lourds, notamment pour les petites structures, car cela les contraint à beaucoup de démarches administratives. Toutes ces contraintes pour l'employeur sont autant de freins pour les salariés qui cherchent à s'expatrier en Allemagne.
Pour résumer, télétravailler en Allemagne n'est pas aussi simple qu'il n'y paraît... il ne suffit pas de prendre son ordinateur et de partir !
En savoir plus :
- Le travail hybride, une nouvelle normalité en Allemagne
- Les 10 meilleurs métiers en télétravail en Allemagne
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Olivier Geslin

