Comment embaucher un salarié en Allemagne : guide complet

Que ce soit en CDI, CDD, temps plein, temps partiel ou mini-job, que vous soyez indépendant(e), TPE, ou entreprise étrangère, vous devrez suivre plusieurs démarches administratives obligatoires pour embaucher un salarié en Allemagne. Pour que vous puissiez vous concentrer sur l'onboarding de vos collaborateurs, voici, étape par étape, comment procéder pour recruter selon les règles de l'art.
2. Entreprise française avec une filiale allemande
3. Société étrangère sans entité en Allemagne
4. Autres situations particulières : télétravail, mini-jobs, temps partiels, stages
5. Salaires et charges patronales en Allemagne
6. Récapitulatif des démarches pour employer un collaborateur
Pour les indépendants ou petites entreprises déjà établis en Allemagne, la première étape consiste à obtenir une Betriebsnummer, c'est-à-dire un numéro d'employeur délivré par la Bundesagentur für Arbeit.
Cette immatriculation est indispensable, même si vous n'embauchez qu'un mini-jobber ou un salarié à temps partiel. Elle permet d'effectuer toutes les déclarations sociales obligatoires auprès des caisses d'assurance maladie.
Une fois ce numéro obtenu, vous pouvez commencer à recruter en Allemagne. Il vous faudra rassembler certaines informations et documents auprès du futur salarié. Voici les plus courants :
- Numéro de sécurité sociale (Rentenversicherungsnummer)
- Carte d'identité et numéro fiscal (Identifikationsnummer)
- Attestation d'assurance maladie (Mitgliedsbescheinigung)
- Données fiscales électroniques (ELStAM)
- Certificats particuliers selon le poste (autorisation de travail, certificat médical, permis de conduire, etc.)
En cas de contrat à durée déterminée, la signature doit intervenir avant la prise de poste, sinon la limitation est juridiquement invalide.
Dans le cas d'un contrat à durée indéterminée, un contrat écrit n'est pas obligatoire avant le début du travail, mais vous devez remettre un document reprenant tous les éléments essentiels du contrat dans le mois suivant l'embauche. Il est donc préférable de rédiger un contrat signé dès le départ. Celui-ci doit préciser :
- la fonction du salarié
- le lieu de travail
- la durée de la période d'essai
- le temps de travail hebdomadaire
- le salaire brut
- les congés annuels
- les délais de préavis
Le salarié doit être enregistré auprès de sa caisse d'assurance maladie, qui transmettra les données aux autres branches de la sécurité sociale.
Vous devrez également déclarer la relation de travail à la Berufsgenossenschaft, qui gère l'assurance accidents du travail, ainsi qu'au Finanzamt via le portail ELSTER, afin de mettre en place la retenue à la source sur le revenu.
Certaines professions exigent aussi une déclaration auprès du Gesundheitsamt, notamment si votre activité implique la manipulation de denrées alimentaires ou des soins à la personne.
Une fois embauché, votre salarié devra figurer sur votre paie mensuelle. Vous pourrez gérer cela à l'aide d'un logiciel certifié ou déléguer la mission à votre comptable. Les cotisations sociales sont complexes à calculer, car elles dépendent du salaire, du statut du salarié et du type de contrat. La transmission des données est entièrement numérique. Des services comme Sage, Lexware ou des fiduciaires locales peuvent vous aider à automatiser ces tâches.
Dans ce cas, la gestion de l'embauche se fait au travers de votre entité allemande, qui est reconnue comme un employeur local à part entière. Elle suit exactement les mêmes démarches que les entreprises allemandes :
- obtention d'une Betriebsnummer
- déclarations sociales via la Krankenkasse du salarié
- inscription à l'assurance accident du travail
- enregistrement fiscal
- transmission des fiches de paie selon les normes allemandes
La filiale doit également respecter le droit du travail local. Cela implique notamment de respecter le SMIC allemand (Mindestlohn), les durées maximales de travail, le nombre minimum de congés (20 jours ouvrables pour une semaine de cinq jours), les règles de prolongation de la période de préavis après deux ou cinq années d’ancienneté, ou encore la signature manuscrite obligatoire pour toute notification de fin de contrat.
Si votre structure dépasse les dix salariés, la législation sur la protection contre le licenciement s'applique, et toute rupture de contrat devra reposer sur un motif légal.
Votre service RH ou un cabinet local pourra vous accompagner dans la mise en place de contrats-types, l'utilisation d'un logiciel de paie compatible avec les exigences allemandes, et la gestion mensuelle des cotisations et impôts. Vous devrez également inscrire votre structure à la Berufsgenossenschaft correspondant à votre secteur.
C'est la situation la plus sensible. Employer une personne vivant et travaillant en Allemagne sans y être immatriculé peut exposer votre entreprise à des requalifications fiscales.
L'administration allemande peut considérer qu'un établissement stable a été créé. Cela implique de devoir vous enregistrer comme employeur étranger, de respecter le droit du travail allemand, de prélever les cotisations sociales et de verser les impôts dus à l'administration fiscale allemande.
Deux solutions s'offrent alors à vous :
La première consiste à créer une entité locale, par exemple une GmbH. Vous entrez ainsi dans le cadre des employeurs allemands, avec tous les droits et devoirs associés.
La seconde option est de passer par un prestataire de type Employer of Record (EOR) ou Professional Employer Organization (PEO). Celui-ci devient légalement l'employeur du salarié en Allemagne, mais vous restez décisionnaire sur son activité et ses conditions de travail. Cette solution est plus onéreuse mais sécurise votre conformité.
Dans tous les cas, les obligations suivantes restent à votre charge ou à celle de votre représentant local :
- rédiger un contrat conforme au droit allemand
- déclarer le salarié à une caisse d'assurance maladie
- transmettre les données salariales aux autorités fiscales et sociales
- souscrire à une assurance accident du travail
La gestion des paies doit être adaptée aux exigences locales, avec transmission électronique obligatoire. Un expert-comptable allemand pourra facilement gérer ces aspects à votre place si vous optez pour un accompagnement complet.
Le mini-job permet de verser un salaire jusqu'à 556 euros par mois sans cotisation salariale complète. L'employeur paie un forfait simplifié à la sécurité sociale, mais doit tout de même inscrire le salarié à la Minijob-Zentrale, obtenir une Betriebsnummer et cotiser à l'assurance accident. Ce type de contrat est souvent utilisé pour des postes auxiliaires dans le nettoyage ou la vente.
Les CDD doivent respecter une durée maximale de deux ans s'ils ne sont pas motivés par une raison précise. Ils doivent être signés physiquement avant l'entrée en poste, sans quoi ils seront automatiquement requalifiés en CDI.
Les étudiants en emploi salarié (Werkstudent) bénéficient d'une exonération partielle de charges sociales, mais doivent être déclarés.
Quant aux stages, s'ils sont obligatoires, ils ne nécessitent pas de rémunération ; sinon, le minimum légal s'applique au-delà de trois mois.
Lorsqu'une entreprise française souhaite employer un salarié basé à distance en Allemagne, sans y avoir d'établissement, elle doit faire preuve de vigilance. En effet, la réglementation française prévoit une limite stricte pour qu'un contrat de travail reste soumis au droit français.
Le salarié ne peut pas exercer son activité plus de 25 % de son temps de travail en dehors du territoire français. Cela équivaut donc à 60 jours annuels dans le cas d'un temps plein. Au-delà de ce seuil, les règles européennes (et notamment le règlement CE n° 883/2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale) imposent un changement de régime social.
La même chose s'applique si le salarié n'a pas d'adresse en France mais uniquement en Allemagne. Il sera alors rattaché au régime social allemand et devient imposable en Allemagne. L'entreprise française doit alors s'enregistrer comme employeur étranger en Allemagne, ou passer par un EOR/PEO.
Du point de vue de l'employeur, embaucher en Allemagne coûte généralement un peu moins cher qu'en France à brut équivalent, grâce à des charges patronales plus modérées (environ 20–21 % contre 42–45 % en France).
Par ailleurs, certains coûts supplémentaires comme l'assurance accidents du travail sont entièrement à la charge de l'employeur en Allemagne. Le taux varie selon le secteur (entre 1 % et 3 % du salaire annuel). Cela signifie que, à coût égal, l'entreprise peut proposer un salaire brut plus élevé au salarié allemand.
Mais pour le salarié, ce brut plus élevé ne garantit pas un net supérieur. En Allemagne, l'impôt sur le revenu est prélevé à la source par l'employeur, selon une grille progressive allant jusqu'à 45 % pour les très hauts revenus, et les cotisations sociales salariales tournent autour de 20–21 %.
Le "sweet spot", c'est-à-dire la zone d'accord optimale, dépend du profil du salarié. Pour un jeune professionnel sans enfant, souvent moins imposé en France grâce aux premières tranches et à la CSG plafonnée, le net à payer peut être plus favorable en France, malgré un brut plus bas.
En revanche, pour un salarié plus expérimenté, familialement chargé ou très qualifié, l'Allemagne peut devenir plus attractive, notamment grâce au système des classes fiscales (Steuerklassen) qui ajuste fortement le taux d'imposition en fonction de la situation familiale.
Pour l'employeur, proposer un brut plus élevé en Allemagne tout en restant dans une enveloppe équivalente au coût français peut donc être une stratégie gagnante, à condition que le salarié comprenne l'impact fiscal réel sur son net.
Un salarié bien informé sur sa classe fiscale et ses cotisations peut y trouver son compte, surtout s'il valorise la transparence et la prévisibilité du système allemand.
En résumé, voici la checklist pour embaucher un salarié en Allemagne :
✅ Obtenir une Betriebsnummer
✅ Rassembler les documents du salarié
✅ Rédiger un contrat de travail conforme
✅ Déclarer le salarié à la sécurité sociale, la Berufsgenossenschaft, le Finanzamt et éventuellement au Gesundheitsamt
✅ Utiliser un logiciel ou un expert pour la paie
✅ Respecter les règles selon le type de contrat (CDI, CDD, mini-job, etc.)
Bien que les démarches soient précises, elles deviennent routinières une fois mises en place. En cas de doute, n'hésitez pas à faire appel à un conseiller en droit du travail allemand ou à un expert-comptable.
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Nikolai Rabald

